Il s’agit de la première adaptation de la pièce de Jules Romains, rendue célèbre en 1923 grâce à l’interprétation de Louis Jouvet dans le rôle titre. Le but premier était, paraît-il, de faire une satire des tactiques commerciales venues des États-Unis, l’auteur imaginant avec malice ce que cela donnerait dans le milieu médical. En réalité, nous sommes très proche d’une satire directe de la médecine moderne, de ses déviances mercantiles et de ses rites destinés à impressionner les patients.

Dans son film, René Hervil s’amuse à faire du docteur Knock un personnage inquiétant, voire menaçant, allant jusqu’à le comparer à une sorte de Fantômas du stéthoscope. Il sait également filmer la vie provinciale et donner quelques belles images d’Uzerche, petit village de Corrèze (notons d’ailleurs qu’une séance spéciale a été organisée en février 2011 dans un cinéma de cette commune, devant les descendants des acteurs et figurants qui apparaissaient dans le film).

Knock bénéficie également de l’interprétation de Fernand Fabre, qui reprend à son compte les effets créés sur scène par Jouvet. Ce dernier, contacté à l’origine pour jouer dans le film, avait décliné l’offre, préférant assurer sa tournée théâtrale. Cela ne l’empêchera pas d’incarner plus tard le rôle à deux reprises pour le cinéma, en 1933 et en 1950.

KNOCK OU LE TRIOMPHE DE LA MÉDECINE

France. 1925. Noir et blanc. Muet. 2700 m (2 h env.).

Réalisation : René Hervil – Scénario : d’après la pièce de Jules Romains – Adaptation : Pierre Hamp, Jean Manoussi – Directeurs de la photographie : René Guychard, Armand Thirard – Directeur artistique : Marcel Vandal – Production : Film d’Art (Marcel Vandal, Charles Delac) – Distribution : Établissements Louis Aubert – Sortie : 18 décembre 1925

Interprétation :

Fernand Fabre (Dr. Knock), Léon Malavier (Dr. Parpalaid), Maryane (Mme Parpalaid), Raoul Darblay (Mousquet), Régiane (Mme Mousquet), Louis Monfils (Raffalens), René Lefèvre (le chauffeur), Georges Morton, Carol (les paysans), Maryse Noël, Iza Reyner, Luce Fabiole, Irma Perrot

Le docteur Knock débarque dans un petit bourg de Corrèze afin de prendre la succession de son confrère Parpalaid, qui se plaint de compter peu de patient parmi la population locale. Convaincu que les gens bien portants sont des malades qui s’ignorent, Knock est près à tous les stratagèmes pour amener les villageois à venir se faire examiner dans son cabinet. Pour commencer, l’astucieux médecin demande au tambour du village d’annoncer en place publique que les consultations sont gratuites le lundi. Il n’en faut pas davantage pour que les patients affluent chez le docteur Knock, qui profite de la situation pour affirmer son emprise. Une partie de la population, désormais persuadée d’être atteinte de tous les maux, se laisse abuser, ce qui fait le bonheur du pharmacien Mousquet, dont les affaires péréclitaient. Bientôt, l’hôtel du village est converti en hôpital. Le docteur Parpalaid, de passage dans la région, est stupéfait devant l’éclatante réussite de Knock qui a maintenant un malade dans chaque maison.

Le film, inspiré par une pièce dont les qualités scéniques se rehaussent d’une langue drue et classique, s’illustre de traits singulièrement cinématographiques. Nulle vedette ; plusieurs des interprètes n’ont jamais paru à l’écran et viennent du théâtre ; chacun apporte un égal concours au parfait ensemble. Ni incendie, ni noyade, ni acrobatie, ni chute. Ni baisers, ni mariage. Un texte sobre. Au début seulement, trop de phrases, mais ces cinq minutes s’oublient quand nous entrons dans le vif de la comédie. »

Lucien Wahl, « L’Oeuvre » (25 décembre 1925)
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